Syndicat des Trufficulteurs de la Région de Lalbenque 06 83 62 34 00

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Jean-Claude Pargney

Professeur des Universités de Nancy en biologie végétale, chercheur, membre de l’Académie des Sciences de Lorraine

Jean-Claude Pargney présentera 2 conférences à l’Auditorium de la Maison communautaire de Lalbenque

Samedi 26 janvier à 17h00 : La truffe, un drôle de champignon

Dimanche 27 janvier à 15h00 : La truffe au cœur de nos sens

Résumé des 2 interventions ci-dessous

La truffe, un drôle de champignon

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La truffe est la fructification d’un champignon qui passe toute son existence dans le sol. Mais vivre dans le sol…que de contraintes ! Elle a donc du s’adapter pour naitre, se développer et vivre.

Se développer, c’est d’abord grossir

Par son activité métabolique, la truffe interagit sur l’activité biologique de son milieu environnemental. Une véritable vie satellitaire qui s’installe autour de la truffe et ce microcosme est fait de vies, de morts, de remue-ménages perpétuels, de recyclages divers, de transferts de nourriture en déjections réutilisables, de remodelages de la moindre fraction de terre, de mouvements d’air et de gaz en relation avec la dynamique des êtres vivants impliqués.

Grossir, c’est d’abord se nourrir

Tant que le bébé-truffe est en relation avec les filaments qui lui ont donné naissance, les nutriments lui sont apportés par eux. Mais la vie souterraine est faite aussi d’animaux en quête de nourriture : limaces, acariens du sol, collemboles, cloportes, millepattes participent au recyclage des filaments de champignons.
Autour de la truffe, un ensemble de faisceaux de filaments périphériques se développent, explorent la terre environnante et y puisent les éléments nutritionnels nécessaires à la truffe. Les gros morceaux de calcaire ne sont pas intéressants pour la truffe car elle ne peut y prélever le calcium dont elle a besoin pour sa croissance ; du calcium y est présent en grande quantité, mais il n’est pas disponible pour les filaments ; c’est dans le calcaire très fin que la truffe trouve cet élément indispensable. Les argiles, le complexe argilo-humique, les matières organiques en cours de décomposition et qui se transforment en humus sont des sources nutritionnelles minérales et carbonées. Des substances complexes comme les tanins, sont des éléments recherchés pour la croissance et l’acquisition des arômes.

Ne pas oublier de respirer

Comme tout être vivant, la truffe a besoin de respirer. Ce sont ces veines blanches qui forment un réseau d’aération efficace, permettant les transferts de gaz à l’intérieur de la truffe. Elles débouchent à la surface de la truffe au niveau d’ouvertures microscopiques par où les échanges gazeux entre l’atmosphère du sol et l’intérieur de la truffe se font. Cela permet à la truffe de trouver dans la porosité de la terre l’oxygène dont elle a besoin pour son métabolisme et son développement. Elle peut aussi éliminer les gaz issus de son activité métabolique, comme le CO2.
Si la terre qui entoure la truffe est bien poreuse, donc bien aérée, l’apport d’oxygène et le rejet de CO2 se font sans problème, le métabolisme est facilité et la truffe a un meilleur développement.  Au contraire si la terre est très compactée, l’oxygénation de la truffe est mauvaise, les gaz issus de son métabolisme s’accumulent dans les veines blanches et d’une manière générale le métabolisme est perturbé. La croissance de la truffe est fortement compromise. De plus, une terre compacte retient l’eau et lors d’un excès d’humidité, la truffe est engorgée, l’eau bouche les veines, les échanges gazeux sont perturbés et la truffe pourrit prématurément.

Et si on aidait la truffe

Comment ? En privilégiant les relations entre la truffe et son sol environnemental. D’où la mise en place d’une nouvelle méthode culturale appelée : la méthode  J.A.AD.
Ses objectifs sont d’augmenter le pourcentage d’arbres producteurs, d’obtenir une récolte précoce, abondante, régulière et pérenne, de récolter des truffes profondes, de qualité (en taille et en arôme) et de réduire les contaminants. Ses principes sont de favoriser l’installation du plant mycorhizé, de privilégier les relations sol/truffe, de travailler en profondeur et de manière différentielle afin d’aider la truffe à s’installer en profondeur et à grossir surtout dans les sols atypiques. Cette méthode est développée dans le livre : « Osez cultiver la truffe autrement » de J.C. Pargney et coll., aux éditions « Misenpage ».

 

La truffe au cœur de nos sens

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A travers nos cinq sens, comment percevons-nous la truffe ?

L’odorat

Pour ce champignon particulier, le premier sens impliqué dans la perception est l’odorat. Au cours de sa maturation, des composés aromatiques sont synthétisés dans la chair de la truffe. Ils migrent ensuite par les veines blanches aérifères et s’en échappent par les micro-ouvertures de la surface. Ils sont diffusés grâce aux pores de la terre et sont captés par les narines d’un animal réceptif.
Plus de 200 substances volatiles sont émises par la truffe. Ce sont principalement des alcools (de l’ordre de 67%), des aldéhydes (plus de 13%), des cétones (plus de 10%) et surtout le fameux sulfure de diméthyle (plus de 7%) qui est le composé essentiel capté par l’odorat des chiens truffiers, des cochons (les truies plus exactement) et des mouches truffigènes (qui recherchent les truffes pour y pondre leurs œufs afin que leurs larves s’en nourrissent). Le sulfure de diméthyle est un composé soufré, léger et très volatil. Il est présent dans une grande variété de produits alimentaires (viande cuite, fromage, agrumes, certains légumes, bière et le vin). Il contribue à l’arôme de nombreux vins. Comme ces composés aromatiques sont volatiles, se pose le problème de leur préservation après récolte et dans l’utilisation de la truffe.

Le goût

Le second sens analysé est le goût. Sens complexe où sont mêlés la perception des saveurs par les récepteurs gustatifs de la langue mais aussi les effluves aromatiques captées par voie rétro-nasale et qui réactivent les centres de l’olfaction.  Toutes ces sensations gustatives et olfactives, réceptionnées par les cavités buccale et nasale, sont transmises au cerveau et analysées. Déguster de la truffe stimule les centres cérébraux du plaisir. Il serait même bien de commencer très tôt, car comme la madeleine de Proust, la dégustation de truffe fait revivre les bons moments et porte une charge émotionnelle qui nous rappelle quelque chose du passé.

Le toucher et la vue

Le toucher et la vue sont largement utilisés dans le choix des truffes. Ce sont les premiers contacts avec la truffe. Ils en définissent une première estimation : sa belle taille ou sa petitesse, sa fermeté ou sa mollesse, son intérêt ou non, l’aspect de sa chair qui révèle son état de maturité.

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Quant au cinquième sens : l’ouïe, je vous laisse imaginer comment la truffe nous parle…